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Gronsveld, le 31 décembre 2020

Willem Boone (WB): Je voulais commencer par ce disque des femmes compositeurs, parce qu’on n’en a pas beaucoup parlé l’autre fois, d’où t’est venu l’idée ?

Didier Castell Jacomin (DCJ) : Alors, c’est parce que j’ai abordé le répertoire des femmes compositeurs. Quand je me suis aperçu que j’ai passé tellement de temps pour apprendre les œuvres dites majeures, parce qu’au piano on passe 80% du temps à apprendre par cœur et 20 % pour découvrir d’autres œuvres, cela laisse très peu d’occasion d’aller à la rencontre d’œuvres dites « mineures », alors que les compositrices ne sont pas mineures du tout, du tout ! Bien entendu, j’avais sélectionné Clara Schumann, je ne pouvais pas passer à côté, mais il y en a d’autres. Je vais certainement faire un deuxième volet dans les deux ans qui arrivent, absolument. Un ingénieur du son de Teldex Studio à Berlin m’a conseillé de jouer plus de musique de Mel Bonis, de continuer dans cette voie parce qu’il a trouvé que c’était une des meilleurs choses que j’aie faite dans ce disque. J’ai découvert sa musique grâce à son arrière petite-fille Christine Géliot. Je joue maintenant avec partition et j’ai beaucoup plus de temps de découvrir d’autres œuvres. J’ai aussi découvert Fanny Hensel-Mendelssohn, mon rapport avec elle est très bizarre. 

WB : Tu m’as dit que tu n’aimes pas beaucoup sa musique ?

DCJ : Il y a des passages qui sont sublimes, mais il y a des choses que je n’aime pas, car je ne me sens pas proche de son génie.

WB : Dans tout ce qu’elle a écrit ?

DCJ : Non,  il y a des choses qui sont sublimes, attention !

WB : Je pense qu’il y a des œuvres que Felix a fait passer pour les siennes !

DCJ : Bien sûr ! Encore que c’est le cerveau qui dit : « c’est Felix Mendelssohn, donc c’est magnifique ! ». Ce n’est pas comme dans Mozart où il n’y a rien à jeter. Même dans Chopin, il disait qu’il n’aimait pas du tout sa première sonate, c’est un travail académique. Mais pour revenir aux compositrices, comme je joue avec partition, c’est dur, c’est un autre travail, cela n’a rien à voir avec le par cœur, mais on n’a pas moins le trac. A partir de ce moment-là, je pouvais aller à la découverte d’autres œuvres.

WB : Qu’est-ce qu’on sait de Cécile Chaminade ? Son nom est assez connu, mais j’ai l’idée que c’est quelqu’un qui n’a écrit que des feuilles d’album un peu comme Moszkofski ou John Field..

DCJ : Pas du tout ! Elle a écrit des études de concert sublimes, des ballets, des symphonies, des œuvres très interessantes, on n’en dénombre pas moins de 400 . Bizet l’appelait le « petit Mozart ». F. Liszt la comparait a Chopin

WB : Qui étaient parmi ses élèves ?

DCJ : Je ne sais pas du tout, je n’ai pas fait de recherches. Elle était la protégée de la reine Victoria, déjà fort âgée à l’époque mais qui l’accueillit a Windsor pour y séjourner quelques temps, 

WB : Qu’est-ce qui est le plus connu de ce qu’elle a écrit ?

DCJ : Je pense que ce sont les études de concert, comme ‘Automne’, Scolastique’ qui est très charmante à jouer. Elle a fait des scherzos qui sont tout aussi intéressants, j’en ai enregistré un, mais je ne l’ai pas mis dans le disque. 

WB : Et elle était bonne pianiste elle-même ?

DCJ : Ah oui ! Elle était aussi bonne compositrice que pianiste. Un peu comme Clara Schumann, mais pas avec la même notoriété, Clara Schumann était au 19ème siècle la Martha Argerich du 20ème siècle. Goethe avait dit d’elle qu’elle avait la force mentale de six hommes réunis ! 

WB : Est-ce qu’elle était prise plus au sérieux que son mari Robert ?

DCJ : Non, elle avait du mal, heureusement il y avait son père qui lui enseignait la musique, Schumann était d’ailleurs aussi l’élève du père de Clara. Pour jouer, elle n’a pas eu de difficultés d’une pianiste de l’époque. Par contre, pour se faire reconnaitre comme compositrice, elle a eu des problèmes, car une femme à l’époque ne pouvait avoir l’imagination d’un homme…. Chose parfaitement fausse et stupide!

WB : Est-ce qu’elle a pu faire éditer ses œuvres de son vivant ?

DCJ : Je pense qu’elle a pu les faire éditer à la fin, parce qu’elle a vécu très longtemps. Elle était née en 1820.

WB : Elle avait dix ans de moins que Robert !

DCJ : Et elle est morte en 1892, elle était très âgée pour l’époque. Il y a une œuvre, la seule et unique œuvre que Robert lui a dédiée, les Geistervariazionen. On les joue depuis 1950. Tu sais pourquoi ? Parce que Clara a interdit la publication jusqu’à cette date-là. C’était son œuvre, c’était pour elle qu’il a composé. En fait, il a aussi dédié le quintette avec piano à Clara, mais ce n’était pas pour elle, c’était pour une princesse. Du coup, il a fait envoyer un énorme bouquet de fleurs a cette Princesse voyant que  Clara était furieuse.

WB : C’est la seule œuvre ?

DCJ : Oui, les Geistervariationen, pas une autre. 

WB : Je croyais qu’il lui avait dédié beaucoup plus d’œuvres ?

DCJ : Une seule !

WB : Mais il a quand même utilisé ses mélodies ?

DCJ : C’est toujours difficile je pense. C’est personnel, c’est par émotion, par sentiment, je pense que le concerto en la mineur de Robert, tout le thème, c’est elle, je sens que c’est elle, je ne vois pas Robert composer ces premières notes. Je trouve que c’est Clara ! D’ailleurs, on fait de grosses erreurs dans ce concerto de Schumann au point de vue tempo. On ne respecte absolument pas le tempo du début, pas du tout. C’est devenu une tradition, évidemment. Tout le monde le joue au tempo que tu entends. Robert a effectivement utilisé certaines mélodie comme par exemple sa « romance variée op.3 ». Il en a fait (tout comme elle) des variations, et chose assez amusante, Brahms a également utilisé ce thème pour également le développer en variations.

WB : Dans la partition, il est marqué « Allegro affetuoso »..

DCJ : Absolument, alors, et c’est là que l’interprète intervient…. Que veut dire Allegro, et Affetuoso? Je sais que pour toi, celle qui te  touche le plus est Martha! Sa compréhension de l’œuvre est magnifique, mais j’aime également énormément Radu Lupu, Arrau, Samson Francois… bref, si chacun d’entre nous arrivons à convaincre avec nos différentes interprétations, de part notre culture, notre savoir et nos émotions, alors…. Nous avons tous raison. C’est ce qui fait la beauté de ce métier.

WB : Est-ce qu’on le joue trop vite ?

DCJ : Cela dépend ce que l’on entend par « vite », mais est-ce que Schumann jouait son œuvre trop vite ? Va savoir !

WB : Il a écrit des Impromptus sur un thème de Clara Wieck ?

DCJ : Il a utilisé ses variations, d’ailleurs Brahms a aussi composé des variations sur le thème de Clara Wieck, le thème varié, opus 3 (j’en ai parlé un peu plus haut dans notre conversation. Le thème varié a été repris par Schumann, il en a fait des variations, comme elle et Brahms aussi. Donc je pense que si Schumann et Brahms prennent des thèmes de Clara Wieck, c’est que ses compositions étaient de très haut niveau. Le scherzo no 2 opus 14 est très beau.

WB : qui est sur ton disque ?

DCJ : Oui, tu sais à quel âge elle l’a composé ?Elle avait 14 ans ! Alors quand on compose comme ça à 14 ans, on entre dans le génie là ! 

WB : Et Mel Bonis qui me semble encore beaucoup moins connue ?

DCJ : Elle commence à sortir de l’ombre grâce a son arrière petite fille qui se bat pour faire reconnaitre le génie de son aïeule.

WB : Etait-elle Américaine ?

DCJ : Non, pas du tout, c’est amusant, parce que son vrai nom était Mélanie Hélène Bonis. D’ailleurs elle a passé un concours de composition, mais à l’époque, les femmes n’avaient pas accès, donc elle a « masculinisé » son nom en se faisant appeler « Mel ».

WB : Et personne ne s’en est rendu compte ?

DCJ : Non et il y avait Debussy dedans, mais c’est elle qui l’a remporté avant Debussy ! Tu vois, par exemple.. C’était une femme très frêle et discrète, elle était secrètement amoureuse d’un poète, mais elle s’est mariée avec un industriel. Elle a réussi à faire de la musique parce que simplement elle a fait croire que c’était pour faire des animations dans la maison, mais ce  n’était absolument pas son but, absolument pas. Et c’est Christine Géliot qui a retrouvé dans la cave tous les manuscrits de son arrière-grand-mère. Elle a mis sa au gout du jour, il y a une association Mel Bonis où elle  se bat pour jouer les œuvres pour les faire éditer, enregistrer, il y a une symphonie qui a été récemment enregistrée. Les pianistes s’intéressent beaucoup à elle, de plus en plus, tu trouves Mel Bonis dans des concours même. C’est encore un avis personnel, mais la Ballade qu’elle a écrite n’a rien à envier à la 4ème Ballade de Chopin , absolument rien ! C’est magnifique, je ne l’ai pas enregistrée, mais c’est une œuvre que j’enregistrerais avec plaisir. 

WB : Et lors de sa vie, est-ce qu’on s’est rendu compte qu’elle était une femme et pas un homme ?

DCJ : Oui, bien entendu, c’était juste pour le concours qu’elle a « changé »  son prénom.

WB : Je m’étais dit qu’elle a dû se faire piéger un jour…

DCJ : Non, pas du tout. Elle avait une santé assez fragile, elle ne jouait pas ses œuvres en fait, vraiment c’est son arrière-petite-fille qui les a remises au gout du jour !  Elle a bien fait, car il y a des merveilles, c’est délicat, c’est intelligent, c’est ressenti, une partie c’est vraiment une écriture féminine je trouve, mais sa Ballade est une pure merveille. Quand on écoute, on se dit : « Tiens, c’est une femme qui a écrit cela ? ». Et pourquoi pas ? On a tous un côté masculin et un côté féminin, chez certains hommes, le côté féminin est plus en avant, c’est pareil avec les femmes, c’est exactement la même chose. J’ai rencontré son arrière-petite-fille et j’ai beaucoup parlé avec elle. Elle a d’ailleurs écrit une magnifique biographie sur son arrière-grand-mère, j’ai l’impression d’être au cinéma quand je l’ai lue. Tu as l’idée de regarder un film, tellement c’est bien écrit. 

WB : Et lors de sa vie, sa musique n’était pas jouée ?

DCJ : Pas du tout ou peu. Ce n’était pas quelqu’un qui faisait du marketing. Ils ont failli tout perdre,  pourquoi c’était son arrière-petite-fille qui s’est occupé de son héritage, sa fille aurait pu le faire aussi, mais cela n’intéressait personne. Son arrière-petite-fille est professeur de piano et elle a dit : « Il faut arrêter, c’est dans la cave où on a mis les manuscrits ! », je suppose qu’il y a des manuscrits qui ont été perdus. 

Et encore quelqu’un d’inconnu dans mon disque, c’est Maria von Martinez..

WB : Oui, je dois dire que je n’ai pas pu trouver le cd à la maison, j’en ai rangé pas mal car j’avais des projets de déménagement, je n’ai pu le retrouver, mais je l’ai écouté et je me souviens que Martinez était pour moi la compositrice la moins intéressante.

DCJ : Peut-être, mais ce que je trouve intéressant, pourquoi je l’ai choisie elle aussi, c’est qu’en fait elle était la voisine de Mozart et l’élève de Haydn, D’ailleurs Mozart lui a dédié son cinquième concerto pour piano, KV 175 mine de rien, donc elle a pris des cours avec Haydn, j’ai trouvé intéressant une femme de cette époque avec deux monstres sacrés en face, c’est intéressant de voir ce qu’elle a compris, ressenti, analysé, comment elle a fait pour en arriver à la composition. Si tu compares avec Haydn et Mozart, évidemment au pont de vue harmonique et mélodique, c’est un peu simple, mais il faut dire aussi, c’est en 1927 tous les manuscrits ont brulé lors d’un incendie, il ne reste que deux sonates et une petite autre chose, c’est tout, donc en fait on ne peut pas tout juger sur une seule œuvre, ce que vraiment elle valait. Il faudrait écouter l’autre sonate et voir si c’est plus mature, plus intéressant, mais j’ai trouvé que là-dedans il y avait des choses très belles malgré tout. 

WB : Et tu as dit que tu envisages déjà un deuxième volume, qui est-ce qui figurerait sur ce deuxième cd ?

DCJ : Je pense remettre a l’honneur  Mel Bonis, car je n’ai pas encore fini et elle me plait beaucoup, je ne vais pas occulter cette fois Louise Farenc, parce que j’aime beaucoup, vraiment.

WB : Elle a beaucoup écrit pour piano !

DCJ : Effectivement, oui, il y a des œuvres assez difficiles, c’est très virtuose, sinon même certaines œuvres de Fanny Mendelssohn, mais il faut que je me replonge dedans, une quatrième…

WB : Amy Beach ?

DCJ : Pourquoi pas ? Ou bien la Néerlandaise, comment s’appelle-t-elle ?

WB : Henriette Bosmans, qui était pianiste d’ailleurs.

DCJ : Justement, ce serait intéressant, je ne connais pas du tout son œuvre.

WB : Je ne connais pas beaucoup non plus, mais j’ai regardé sur Wikipedia, à la fin de sa vie elle a écrit beaucoup de musique vocale, mais il y a un concertino pour piano et orchestre et parmi sa musique de chambre, il y a une très belle sonate pour violoncelle et piano.

DCJ : Ce serait intéressant dans ce cas-là.. je ne sais combien de temps dure le concertino, mais si on peut le réduire en version quatuor à cordes et piano, pourquoi pas ?

WB : J’ai fait quelques recherches sur les compositrices et si c’est la combinaison chant humain et piano, il y a Pauline Viardot.

DCJ : Bien sûr !

WB : Alma Mahler.., Lili Boulanger… ou qui encore?

DCJ : Elisabeth Jacquet de la Guerre par exemple, il y en a plein ! En tout cas, il y aura Bonis et Farenc sur mon prochain disque. Pour le premier disque que j’ai fait, j’ai fait une année de recherches, je me suis baladé dans l’Europe, je ne suis pas restée derrière l’ordinateur ! J’ai rencontré des gens qui connaissaient, est-ce que tout ce travail se sent quand on écoute ce que j’ai enregistré ? Ce disque, je n’en peux plus de le voir (rires), il passe sans arrêt sur Radio 4 (la radio hollandaise pour musique classique, WB), mais j’ai envie de leur dire que je n’ai pas enregistré que cela, c’est déjà énorme, je ne vais pas cracher dans la soupe, c’est déjà fantastique qu’un artiste ait un disque phare, qui passe partout en Europe, aux Etats Unis…

WB : Cela n’a pas été fait avant !

DCJ : Je pense avoir été l’un des précurseurs, c’est pour cela que les gens y sont peut-être attachés, Teldex Berlin, c’est quand même le studio européen avec une acoustique extraordinaire, j’avais trois Steinway devant moi, j’avais une heure pour choisir le Steinway. Beaucoup d’autres y ont enregistré, comme Perahia, Matthias Goerne, je l’y ai rencontré.

WB : Ce ne sont pas les pires !

DCJ : Non, Isabelle Faust, Anne Sophie Mutter aussi. J’enregistrerai encore là je pense.

WB : Nous avons brièvement parlé de ce disque avant et tu m’as dit que le cerveau d’une femme n’est pas comme celui d’un homme ?

DCJ : Attention, ce n’est pas du tout péjoratif ! Il y a une logique qu’on trouve chez un homme, chez une femme c’est aussi logique, mais différent….. une femme, je t’assure au point de vue harmonique on s’attend à ça, et non, ça part de l’autre côté. Je t’assure que c’est des fois, maintenant je suis habitué, j’ai fait l’incursion dans leur cerveau en essayant de me mettre réellement à leur place (modestement), c’est beaucoup plus facile pour moi…

WB : Question écriture ?

DCJ : Oui.

WB : Tu ne trouves pas cela chez un homme ?

DCJ : Bien sûr que si!, mais la logique me convient mieux. Il n’y a que les hommes qui soient logiques, attention, ce n’est pas du tout un souci ! Tu marches sur des œufs quand tu vas transcrire ça ! 

WB : Parlons de Paul Badura-Skoda, parce qu’on ne l’a pas fait l’autre fois, comment l’as-tu connu ?

DCJ : C’était extraordinaire, dans le cadre d’une série à Paris, à la Salle Cortot, le musée Jacquemart André et le troisième lieu, je ne sais plus..

WB : La Salle Gaveau ?

DCJ : Non, j’ai joué à deux endroits, à Cortot et dans l’autre salle, j’avais entendu parler tout le temps de Paul Badura-Skoda, ça me « rendait nerveux »et j’ai dit : « Dites-lui que j’ai envie de le rencontrer ! », on m’a dit de lui envoyer mon disque Mozart puisqu’il était spécialiste de Mozart, Haydn, Bach aussi, beaucoup d’autres choses, j’ai envoyé le disque, mais je n’ai pas eu de réponse et j’ai reçu un SMS de …( ?) « Est-ce que tu m’aimes ? » et je me suis dit : « Il commence fort ! » et cela s’arrête là. J’ai reçu un autre SMS « parce que Badura-Skoda est tout à fait prêt à te rencontrer en Autriche, à Vienne. Je suis tombé par terre, j’ai contacté son épouse, Elisabeth Vidal, et on correspondait par téléphone ou par mail, on a fixé un rendez-vous et je suis arrivé une demi-heure à l’avance, il y avait un café en bas de chez eux, j’ai vu le nom de Badura-Skoda, je me suis dit que c’était hallucinant, et après deux cafés arrivait l’heure, 14 heures, je sonne et il a dit : « Ah, c’est Didier, c’est très bien ! » c’était Elisabeth : « Tu vas au fond de la cour, tu prends à gauche, je ne vais jamais retenir, tu montes par le monte-charge , parce qu’il avait ses pianos, il y avait un monte-charge spécial, ils avaient choisi cet appartement-là, parce qu’il y avait la possibilité de descendre des pianos et de les monter. Je monte et je sors, à gauche, c’était son  appartement et je vois Paul qui ouvre la porte, alors j’ai tout son pédigrée qui me défilait devant les yeux : jouer avec Furtwangler, Karajan, toutes ces tournées monumentales et Paul qui me dit : « Alors, moi c’est Paul, toi c’est Didier, tu m’appelles soit « Paul », soit « Badura », tu me dis « tu », alors là, j’ai dit : « ça, je ne crois pas ! C’est « maestro »bien sûr ! » et tout de suite, il m’a mis au piano, puisque j’étais là, on a décidé de jouer le double concerto de Mozart, et il avait une autre idée, on va faire le triple concerto en même temps, dans la réduction à deux pianos. Bon, pourquoi pas ? Je commence, et comme lui avait 86 ans, je n’ai pas joué trop fort ni trop vite, mais qu’est-ce que j’ai été idiot, parce qu’évidemment, c’est un pianiste hors pair, mais à cet âge-là, il était un pianiste hyper-professionnel, je joue comme j’ai l’habitude de jouer, comme je suis à deux pianos. Dans le deuxième mouvement, j’ai osé dire : « Maestro, je pense que là on va un peu trop vite » et  il m’a dit : « Je pense que tu as raison, parce qu’en fait moi je joue toujours très vite, parce que je suis proche de la mort, alors je n’ai plus de temps !’ Mais comme c’était extraordinaire.  Son intelligence, je ne parle même pas musicale, cette humanité qu’il avait, c’était un être humain exceptionnel, je n’ai pas eu le temps de m’apercevoir que je jouais avec l’un des plus grands pianistes du 20ème siècle. 

WB : Je l’ai interviewé aussi et il n’était pas content qu’on l’appelle « pianiste classique », il m’a dit qu’il avait fait beaucoup de Chopin, Schumann, Liszt, Brahms …. »

DCJ : Il a enregistré les Etudes de Chopin et je peux dire que cela fait pâlir tout le monde ! C’est impressionnant.

WB : Peut-on dire qu’il a été méconnu?

DCJ : Non il n’était absolument pas méconnu, au contraire, il a laissé un héritage musical très impressionnant!  Notamment la révision de tous les concertos de Mozart et de Haydn, ses livres, ses innombrables enregistrements. 

WB : Il était reconnu pour les maitres viennois.

DCJ : Absolument, mais il n’était pas reconnu pour ses Brahms, ses Chopin, ses Schumann. Il m’a offert tous ses disques, je les ai tous, et je peux te dire qu’il est remarquable dans chacun de ces compositeurs.

WB : Et  il a joué aussi Franck Martin, non ?

DCJ : Mais oui, il avait un répertoire monumental et le problème était qu’il était catalogué à son époque, il aurait fait carrière maintenant sans cette étiquette. 

WB : Il a fait énormément de recherches aussi !

DCJ : Mon dieu, c’était énorme, quand on a joué ensemble à Maastricht, il a joué une partie en soliste et je regardais sa partition, écoute, il y avait des retours sur Goethe et plein de poètes, il apprenait d’une certaine manière avec, je suis persuadé, quand il jouait, il mettait des notes à côté, comme tout le monde, mais les gros trous de mémoire, peut-être ça lui arrivait une ou deux fois dans toute sa vie, je regardais comme il pensait : « Cela me fait penser à telle et telle phrase de tel poète à tel moment » surtout chez Schubert, qui est très vicieux, si tu rates le pont, tu retournes au début, donc tu as plutôt intérêt à ne pas louper le pont. Je suis persuadé qu’il se souvenait non seulement des notes, mais de ces poèmes aussi. C’était un acharné de travail jusqu’à la fin.

WB : Je lui ai demandé concernant ses recherches de Mozart et il a dit qu’on doit beaucoup à l’écriture de Mozart et à ses lettres aussi. 

DCJ : Il ne s’intéressait pas uniquement qu’à la musique, à ce que l’homme était le contexte aussi, dans quel contexte géopolitique il a vécu, quel contexte royal aussi, les lettres, les courriers, tout ce qui fait l’homme en fait.

WB : Il m’a dit que Mozart s’est très clairement exprimé sur l’exécution de ses œuvres.

DCJ : Absolument, mais tout est écrit chez Mozart, absolument tout. C’est pour cela que c’est très difficile de jouer Mozart. Il n’y a pas beaucoup de pianistes qui le jouent bien, ou du moins qui le comprennent…. En ce qui me concerne je suis toujours à la recherche du « Graal »…..

WB : Les interprétations de Perahia sont très belles !

DCJ : Oui, bien sûr!, mais  aussi Haskil, Lupu, sans oublier bien sur mon Maestro Fausto Zadra, qui a mon sens fut LE Mozartien toute époque confondues

WB : Ashkenazy a fait de très beaux Mozart aussi..

DCJ : Je préfère par contre ses Rachmaninov, là c’est sublimissime, ses Rachmaninov sont d’une intelligence sans pareil !

WB : Mais il a fait un disque Mozart avec Istvan Kertesz, entre autres avec le Jeunehomme, que c’est beau ! 

DCJ : J’ai du mal, car j’ai tellement appris Mozart avec Zadra, tellement appris d’une certaine manière, il y a autant de manières que de pianistes bien entendu, mais j’ai tellement travaillé Mozart avec Zadra que j’ai du mal à l’écouter par quelqu’un d’autre hormis Pires, Haskil, Lupu, Perahia. Mais à l’heure actuelle….

WB : C’est Badura Skoda qui m’a dit aussi que Mozart ne touche jamais la terre dans sa musique..

DCJ : Ce n’est jamais « en bas » chez Mozart, c’est toujours en haut ! Il y a des bases, de appuis, mais ce sont que des appuis, ce sont que des fondations et après tu t’élèves !

WB : Et puis il a dit que Mozart était le Liszt de son temps !

DCJ : Certainement! Sauf que l’écriture de Liszt est radicalement a l’opposé de celle de Mozart. Les traits chez Liszt sont la (pas tout le temps bien sûr) pour donner une impression harmonique, alors que chez Mozart tout comme chez Chopin, chaque note dans un trait a une importance capitale.

WB : C’est curieux, j’ai connu Badura Skoda quand il était juré pour le concours Liszt à Utrecht et il a donné une masterclass Liszt et il venu en retard à cause d’une interview avec moi…

DCJ : Connais-tu Elisabeth ?

WB : Non, je ne la connais pas.

DCJ : C’était en quelle année ?

WB : C’était en 2014.

DCJ : 2014.. tu n’as peut être pas dû la voir, mais elle l’accompagnait toujours. 

WB : Badura Skoda m’intéressait aussi parce qu’il était le seul à jouer sur des pianoforte d’époque et des pianos modernes. Pour les instruments d’époque, il m’a dit que c’était une « conversion ».

DCJ : Absolument, je suis tout à fait d’accord avec ce qu’il dit, aucun problème. Et c’est vrai que c’est le spécialiste du pianoforte. Ce n’est pas du tout la même technique. A Maastricht, quand on a joué ensemble, il a joué sur piano et sur pianoforte, c’était exceptionnel. Je ne pense pas qu’il l’ait jamais fait dans sa vie. C’était au moment des attentats à Paris et lors du concert, il a rajouté une œuvre pour penser aux victimes de l’attentat. 

WB : Il y avait les deux instruments ?

DCJ : Oui, en effet. 

WB : Il m’a raconté d’avoir joué à Londres l’Appassionata, d’abord sur piano moderne et après sur pianoforte ou inversement, et apparemment le public a préféré le vieil instrument.

DCJ : C’est possible, aussi peut-être parce que c’est sur ce type de piano que Beethoven a composé.

WB : Pourtant, si quelqu’un joue sur les deux instruments, est-ce que cela ne fait pas un peu étrange, comme si on ne pouvait pas se décider ?

DCJ : Ah non, parce qu’il était spécialisé dans les deux domaines, il n’y avait aucun problème. Il était aussi professionnel sur piano moderne que sur pianoforte.

WB : Quel est l’intérêt de jouer sur un piano d’époque ?

DCJ : Simplement pour avoir la sonorité que Beethoven entendait (puisque tu as évoqué Beethoven), c’est intéressant, lui a trouvé d’autres intérêts, c’est certain. Moi je trouve intéressant, mais c’est une tout autre technique. Le clavecin ou l’épinette sont encore différents.

WB : Je me souviens d’une autre interview avec un très bon fortepianiste, Kristiaan Bezuidenhout, que j’ai entendu jouer une fois le Triple Concerto de Beethoven au Muziekgebouw aan het IJ à Amsterdam, qui n’est pas une grande salle. C’était avec l’Orchestre du 18ème siècle, donc pas une grande formation symphonique, ils n’ont pas couvert l’instrument et pourtant j’ai à peine entendu le pianoforte, il était quasiment inaudible. C’est ça le problème, dans un studio, ça va, mais dans une salle de concert ! 

DCJ : A l’époque, il n’y avait pas de grandes salles, sauf que pour l’opéra, je me demande si on jouait beaucoup dans des salles pour 3000 personnes. 

WB : Justement, Badura Skoda m’a dit aussi qu’on manipule des cd de pianoforte, il m’a dit qu’on l’avait fait pour les siens aussi..

DCJ : Avec la technologie tu peux tout manipuler. Tu peux enregistrer un cd de 65 minutes note à note !Je ne veux pas qu’on manipule le son de mes disques, c’est comme ça que je joue et pas autrement. Je n’ai pas envie qu’on me dise : « C’était génial, mais au piano quand on l’entend, ce n’est pas le même son ! » Les gens qui m’entendent savent que j’ai le son que j’ai en disque. 

WB : Qu’as-tu appris de Badura Skoda ?

DCJ : De prendre le temps, vraiment de prendre le temps pour étudier une œuvre, aussi la précision, parce qu’on oublie des fois. Il m’a appris aussi à s’écouter intérieurement, il était d’une très grande précision quand on travaillait ensemble. Il ne laissait rien passer, jusqu’aux ornements. Il a noté des remarques, il refaisait des lignes dans mes partitions de piano à quatre mains : « C’est sur cette note qu’il faut commencer, pas la note inférieure, mais la note supérieure, pour faire l’ornement. » Il a eu les manuscrits en main. J’ai appris également que l’homme peut également être formidable dans son entièreté, malgré les défauts qui nous caractérisent. J’ai appris a rester fidèle à l’instrument mais aussi aux œuvres que je désirais aborder.

WB : Est-ce qu’il utilisait des Urtext ?

DCJ : Oui, mais il a eu la chance d’avoir en main les manuscrits de Mozart. C’est pour ça qu’il a refait des.. comment est-ce qu’on dit, il a ré-annoté les sonates de Mozart. Il a vu les manuscrits, donc il a scruté tout. 

WB : Est-ce qu’il y a eu d’autres rencontres qui t’ont beaucoup marquées ?

DCJ : Zadra évidemment, Cziffra aussi, bien entendu… Catherine Collard et Anne Marie Tabachnik, qui vient de décéder. Sans elle, je ne pense pas que j’aurais eu cette technique-là. Zadra, c’était bien beau, mais lui, il enseignait la technique, mais il reposait sur sa femme, sur Marie Louise, Anne Tabachnik, et quelques autres                 assistantes qu’il avait. Au tout début, ils ont fondé cette école de piano et elle a vraiment eu absolument tout. Elle était terrible parce qu’elle était très précise, comme Zadra, pareil. Cela m’a couté dix ans pour avoir cela, on pense que c’est naturel. Anne Marie elle était capable, je me souviens des 32 variations de Beethoven, de rester sur une ligne pendant plus d’une heure. Je te jure, « Qu’est-ce que tu veux faire ? Pourquoi tu utilises ce geste-là ? » Au bout d’une heure, j’ai dit : « Ecoute, je vais fumer une cigarette car je sens que dans deux minutes, je vais vous taper ! » Elle est partie dans un éclat de rire, je devais avoir une tête rouge, mais je n’en pouvais plus. C’était quelqu’un qui m’a toujours accompagné, soutenu, elle m’a enseigné avec une patience extraordinaire… Et tout récemment j’ai renoué contact avec la pianiste et amie Roberte Mamou, qui est une femme extraordinaire et une artiste fabuleuse!

WB: Peux-tu nous en dire plus sur Roberte Mamou?

DCJ: Roberte est une artiste qui vit entre Bruxelles et Paris. Il y a des années de cela je suis allé l’écouter dans le concerto de Mozart « Jeunehomme » a Anvers. Ce fut magistral! Alors je l’ai contactée après le concert, puis on s’est perdu de vue. Et voici quelques mois deja qu’elle m'a recontacté et début juillet je suis allé a sa rencontre à Bruxelles, chez elle. Cette femme a une carrière extraordinaire. Elle a joué partout! Philharmonie de Berlin, avec l’Orchestre Symphonique, ou encore à Dresde, Au théâtre de la Monnaie, au Concertgebouw. Elle joue en musique de Chambre avec Olivier Charlier, Gary Hoffman, Franz Helmerson, le quatuor Enesco etc… On ne compte plus les récompenses qu’elle a eues pour ses enregistrements (Diapason d’or pour son intégrale des sonates de Mozart, par exemple.) Je t’invite, du reste à la contacter pour l’interviewer! Bref, cette personne est d’une grande humanité et humilité. A (re)découvrir d’urgence a mon sens! (WB: je n’y manquerais pas, car tu excites ma curiosité)

WB : Et avec Zadra ils ont perpétué l’école de Scaramuzza ? 

DCJ : Tout à fait, parce que cette technique vient de Vincenzo Scaramuzza, qui était le professeur de Zadra, de Martha, de Enrique Barenboim, le père de Daniel. Cette technique est vraiment spéciale.

WB : Scaramuzza était un professeur extraordinaire ! 

DCJ : D’après Zadra, c’était vraiment quelqu’un de très dur, il faisait rarement de compliments, mais oui, il était extraordinaire.

WB : Il y a cette anecdote d’Argerich : Scaramuzza souffrait d’asthme et il n’a pu assister à son premier concert, où elle jouait le ré mineur de Mozart, le 1er de Beethoven et une Suite Française de Bach, il a dit : « Je vous ai écouté à la radio et j’ai été presque content. » Et Martha a dit : ‘C’est le « presque » qui m’a plu ! » Elle a exulté, parce que c’était « presque ».

DCJ : Bien sûr !  Zadra était de la même veine, la même école, qui est très précise, basée simplement sur une position de main qui reste la plus ouverte possible, ça donne beaucoup plus de travail techniquement, parce que changer de doigté serait plus facile. Mais dans ce cas-là, je détruis ma main et je détruis donc mon équilibre et je vais avoir des sonorités qui ne sont pas régulières et je n’aurais plus un légato fluide. Donc il s’agit de toujours garder cette même position quand c’est possible, ou le légato du bras par exemple et de pas tourner la main. Tout découle de là en fait. 

WB : Est-ce que Scaramuzza a mis par écrit toutes ses théories ?

DCJ : Je ne suis pas sûr,  je ne crois pas. Je pense que ce sont simplement ses élèves qui ont perpétré la tradition et cette technique-là. Tu les reconnais à dix kilomètres…

WB : Ce n’est pas facile, la décontraction !

DCJ : Mais pas du tout ! On ne peut pas mettre par écrit ce que c’est qu’une technique. On peut donner certaines choses, mais on ne peut absolument pas aller en profondeur. Pourquoi ? Parce qu’il faut simplement que tu ressentes toi-même tout ce qui se passe dans le corps. C’est important, si tu ne connais pas du tout comment est fait ton corps, je parle vraiment du corps, pas uniquement de la main. La main, le doigt, c’est quoi ? C’est la fin de ce qui est là, ce n’est pas le début, donc tu peux répéter à l’infini, ce n’est pas ça qui va te faire entrer dans la musique, ni les bons gestes ni la bonne interprétation.. Tu prends toujours le clavier vers toi, si tu pousses, tu vas avoir un son très dur. Si tu prends, ton son va être ample. Jamais taper !

WB : Les Russes disent la même chose..

DCJ : Comme je le disais il n’existe pas qu’une seule technique. A partir du moment où elle est saine, logique, comprise et assimilée, et adaptée à ta morphologie et qu’elle sert la musique, alors tout est permis

WB : Et quelques questions sur la musique française : tu m’as dit il y a un an et disons que c’était un pavé dans la mare, que tu n’aimes pas la musique française parce que tu en avais marre des demi-teintes…

DCJ : Ecoute, la musique française, je ne la comprends pas comme je devrais peut-être. C’est marrant, parce que Mel Bonis, c’est de la musique française et pourtant je la comprends tout à fait. Je ne sais pas, j’aime l’écouter, mais la jouer, c’est assez délicat pour moi, hormis certaines œuvres de Saint Saens, Faure, Poulenc et Ravel

WB : Gaspard de la nuit ? Le concerto pour la main gauche ?

DCJ : Bien sûr, le concerto en sol est superbe aussi. Par contre, je ne me sens pas proche de Debussy du tout, de Satie non plus. 

WB : Et Saint Seans ?

DCJ : Oui et j’aime Poulenc aussi. Les concertos de Saint Seans tombent bien sous les doigts. Je ne peux pas dire « toute la musique française », c’est trop réducteur. Chez Debussy, il y a des merveilles aussi : les Arabesques, les Estampes…

WB : l’Isle joyeuse ?

DCJ : Ce n’est pas quelque chose pour moi, c’est vraiment moi qui ne comprends pas assez cette musique de Debussy, mais il y a de très belles choses. J’aime particulièrement  cette œuvre interprétée par des pianistes français comme Samson François 

WB : Tu joues le concerto de Lalo, pourquoi celui-là ?

DCJ : J’ai été un peu forcé en fait, c’était un chef d’orchestre (mon ami David Grandis)  aux Etats Unis. Je voulais évidemment jouer un concerto de Mozart, mais il a dit : « Non, Mozart, ce n’est pas ma tasse de thé, comme tu es français, j’aimerais que tu joues une œuvre inconnue d’un compositeur connu. Alors je me suis dit : ‘Tu as un problème ! Où vais-je trouver une chose pareille ? J’ai trouvé de ces choses, j’ai complètement oublié les noms, mais on comprend pourquoi elles ne sont jamais jouées !  Il y a des œuvres qui sont des purges monumentales. C’est marrant, parce que le concerto de Lalo, je l’ai écouté et j’ai surtout aimé le 3ème mouvement. Le concerto n’est pas facile du tout, pour beaucoup, c’est une œuvre mineure. Quand on dit « mineur »et « majeur », je veux bien, mais cela dépend de la sensibilité de chacun. J’adore ce concerto-là que malheureusement je n’ai joué que deux fois. J’aurais aimé le jouer plusieurs fois, aussi dans une réduction avec quatuor à cordes. 

WB : Est-ce un concerto costaud ?

DCJ : Ah oui, pas très long, il fait 24, 25 minutes maximum je crois, mais par contre, il est assez intense et surtout tu as besoin de plus de 80 personnes sur scène ! Pour couvrir 80 personnes, je reviens encore à la technique de Zadra, je n’ai aucun problème.

WB : J’ai lu un commentaire sur YouTube : « C’est l’exemple parfait du concerto français se démarquant l’influence allemande qui a trop imposé les standards. »

DCJ : Pourquoi pas, je suis plutôt d’accord avec cela ! Complètement même, mais après tu tombes amoureux d’une œuvre aussi.

WB : Pour Lalo, c’est un peu malhonnête, parce qu’on ne connait que La symphonie espagnole.. 

DCJ : Il a fait une œuvre qui est géniale, « Namouna », une musique de ballet, c’est à tomber, sublime ! 

WB : Et il a écrit un concerto russe pour violon aussi si je me souviens bien ?

DCJ : Oui, et surtout son concerto pour violoncelle est souvent joué. Ce serait intéressant d’organiser une soirée avec le concerto pour violon et ceux pour violoncelle et piano ! Ce pourrait être marrant à faire.

WB : J’ai lu sur le 1er mouvement du concerto pour piano : « s’ouvre sur une introduction lente, l’orchestre introduit le piano, retenu sur le modèle du 4ème concerto de Beethoven. »

DCJ : Oui, c’est absolument vrai et le thème du concerto a été utilisé ensuite, rien de mieux par Maurice Jarre qui a composé la musique du film « Lawrence of Arabia ». C’est exactement le même thème. Je ne pense pas que ce soit une coïncidence et si c’en est une, c’est extraordinaire. 

WB : Un autre commentaire : « Du romantisme à l’état pur »

DCJ : Je trouve aussi! Ou post romantique plutôt…..Car on y retrouve une ambiance des grands compositeurs Russes comme Rachmaninov 

WB : « Grandeur, lyrisme, il y a tous les ingrédients d’un grand concerto »

DCJ : Ah oui !

WB : « Du brio, du piano, à celui de l’orchestration, rien ne semble manquer »

DCJ : Je suis tout à fait d’accord, qui est-ce qui a dit tout cela ?

WB : Je suis allé sur le site d’Amazon où les gens font parfois des commentaires sur des disques. Il y a quelques rares cd de ce concerto.

DCJ : D’accord ! Oui, il y a en a trois : il y a une pianiste allemande qui le joue remarquablement bien, il y a le pianiste français Philippe Bianconi, je ne sais pas s’il en a fait un cd. Ces commentaires sont intelligents, moi qui le joue, je reconnais tout à fait.

WB : Et tu m’as dit que tu prépares un disque Schubert.

DCJ : Pour Naxos, oui, avec 80 œuvres, de toutes petites œuvres de jeunesse, comme les valses, les Ländler, les écossaises. Schubert était entouré de ce qu’on appelait ses « mignons » et composa entre autres ses petites œuvres pour eux. Mais quand je dis petites œuvres, c’est juste parce qu’elles sont assez courtes. Evidemment ces œuvres sont de petites perles. Il y a des changements de tonalité toutes les 2 ou 3 lignes, ce qui est pour le cerveau assez fatiguant d’ailleurs! Mais je suis ravi de pouvoir aborder ce répertoire assez méconnu du grand public. Par contre les danseurs connaissent la plupart de ces œuvres la, car elles sont très jouées dans les cours. Du coup, quand on interprète ces pièces-là, il faut savoir danser et chanter! Si tu ne parviens pas a danser et/ou chanter quand tu écoutes ces œuvres, alors le pianiste n’a pas su percer le secret de ces « miniatures »…..

WB : J’ai juste une question : est-ce que c’est un programme pour un cd qu’on veut écouter en boucle ?

DCJ : Même moi, je ne le ferais pas (rires), je pense que ce peut être très intéressant si on a envie d’écouter telle valse ou telles écossaises etc… mais écouter en boucle, je pense que ça deviendrait vite lassant. C’est comme le caviar… je ne me vois pas en manger à la louche, car je n’apprécierai plus le coté exceptionnel de celui-ci. Pour moi c’est un peu pareil avec cet enregistrement.

WB : Je ne m’intéresse pas non plus à un cd où il n’y a que des mazurkas de Chopin ou que des nocturnes.

DCJ : Je devais choisir : soit Schubert, soit Anton Rubinstein, soit Scarlatti, donc j’ai choisi Schubert. J’ai essayé de leur faire de propositions, par exemple avec les compositrices. Mais chez Naxos, ils veulent aussi des œuvres qui n’ont pas encore été enregistrées, ou très peu.

WB : Et Scarlatti, ça te dit ?

DCJ : Cela pourrait me dire, oui, mais le problème est que pour les ornements qu’il faut que je me plonge complètement dedans, sinon on se fait massacrer par des spécialistes ou critiques.

WB : Scarlatti est bien pour la technique aussi…

DCJ : Il y a des choses qui sont redoutables, vraiment redoutables. J’ai pensé après mon disque Mozart avec Naxos, aller de Mozart à Scarlatti, ce n’est pas forcément bienvenu. Par contre, aller de Mozart à Schubert, ça va, parce qu’encore une fois, là tout est écrit. Et comme ce sont des œuvres qui sont méconnues, c’est intéressant à faire, mais ça va être difficile de tout enregistrer d’affilé, je sens que je vais craquer, parce que tu restes toujours dans ce rythme de trois pour les valses et les Ländler et un rythme de deux pour les écossaises  c’est terrible ! Mais au-delà de ça c’est l’investissement de soi qu’il faut gérer afin d’essayer de donner dans chaque « miniatures » l’excellence que Schubert voulait.

WB : J’admire ton courage et ton dynamisme d’aller de l’avant en ces temps, de ne pas attendre passivement, je pense que tu appuies sur les bons boutons.

DCJ : Je ne sais pas, parce que je pense que  Les gens sont parfois surpris de comment je peux m’exprimer, ce peut être un langage soutenu, mais je peux aller dans un langage peu conventionnel et beaucoup moins soutenu…., sans aucun problème, ça ne me dérange pas, mais cela dérange certaines personnes qui disent : « Mais ce n’est pas possible, de jouer Mozart comme ça et parler comme ça ! » Mais oui, je peux ! Je vais toujours de l’avant, même si cela n’a pas l’impact comme je veux, comme avec le festival que j’ai fait cet été, c’était contre toutes ces restrictions ridicules qu’on nous a imposé, pas uniquement les Pays Bas, aussi en Italie et partout contre ce virus-là et ce n’est pas possible ! On ne peut pas tuer la culture comme ça, déjà on avait un public restreint, mais alors là, on nous achève et on ne peut plus jouer. Après, est-ce qu’on a besoin du public ? Bien sûr, mais si on est un peu plus modeste et un peu plus humble, alors on n’a pas besoin du public, on plonge dans l’œuvre, et c’est déjà pas mal qu’on ait eu de pages que ces génies nous ont laissé, alors la moindre des choses c’est qu’on se calme. Par contre lors de ce confinement, j’ai été très en colère, j’ai pensé à tous les artistes et à moi bien sûr, et comment on a restreint nos possibilités. Après je me suis dit que ce n’est pas bien de s’énerver, on y est à plein dedans et il faut trouver d’autres choses. Quand tu regardes dans quelles conditions les compositeurs ont écrit ces merveilles, cela permet de relativiser un peu. Il n’empêche pas que mentalement parlant, on est bousculé, c’est évident. L’ego en prend un coup aussi, il faut le dire. Si tu trouves un pianiste qui dit : « Non, cela n’a pas touché mon ego !’, mais bien sûr qu’on a des egos surdimensionnés, parce qu’il faut être complètement cinglé pour aller sur une scène, si tu es un être normal, tu n’as pas envie d’aller sur une scène pour se mettre en avant. C’est ce que j’ai trouvé génial chez Badura Skoda, probablement c’est arrivé à la fin de sa vie, c’est que quand il jouait, tu ne voyais plus le pianiste. Il était transparent, tu n’entendais, tu ne voyais que de la musique. Je voudrais arriver à cela, je suis très loin du compte, comme beaucoup.. Puis je me refuse à faire de la musique en « plastique », être devant la caméra, tu joues, tu amuses la galerie, non, c’est hors de question, ce n’est plus de mon âge! Mais je comprends parfaitement ceux et celles qui utilisent ce moyen la! 

WB : Pourtant cela a du faire du bien qu’il y ait eu des musiciens qui ont voulu jouer malgré tout !

DCJ : Attention, ce que je dis, c’est mon témoignage, je ne critique pas les autres ! Je dis que la musique en plastique, ce n’est pas pour moi, je ne peux pas. Je n’ai pas travaillé avec des gens aussi géniaux comme Cziffra, Catherine Collard, Zadra, Anne-MarieTabachnik, je n’ai pas rencontré des gens comme Badura Skoda et d’autres pour me retrouver à faire de la musique comme ça. Peut-être que les jeunes doivent le faire, sinon ils disparaissent de la scène internationale… Du coup, en n’utilisant pas ce moyen, je risque de disparaitre de la surface musicale! (Rires)

WB : Cela relève peut-être de la même volonté de vouloir faire de la musique ? Mais quand vous avez pu jouer ensemble en aout, tout le monde a dû avoir la même sensation d’être content de rejouer devant un public ? 

DCJ : Oui, c’est certain, c’est grisant, c’est pour cela que je te dis que l’égo est important. S’il est bien placé, ton égo, il sera au service de la musique. Pour beaucoup, ce n’est pas au service de la musique, et même si c’est le cas, moi y compris, on se laisse un peu attirer par les lumières, les paillettes, c’est là qu’il faut faire attention. C’est très difficile, je ne jette de pierres à personne. Il y avait un médecin à Rennes, qui a un ami qui m’a dit : « Tout le monde est éreinté à cause du covid, est-ce que cela te dirait de jouer tous les jours dix minutes pour nous et pour mon équipe ? » et je l’ai fait, pratiquement toujours à la même heure, j’ai fait à peu près quarante interventions, mais c’était pour lui. Si c’est pour quelqu’un qui va ressentir quelque chose, même si ce n’est pas dans des conditions extraordinaires, je savais que je donnais à quelqu’un et c’est intéressant. Il faut donner, on est fait pour cela, une fois que tu as travaillé une œuvre, qu’est-ce que tu en fais s’il n’y a pas le public pour la recevoir et qui va te redonner ? C’est un échange, c’est un lieu commun, tout le monde te dira la même chose. Par contre mes interventions ne duraient que 10 minutes et c’était dans un but précis, pour un ami précis. 

WB : C’est au public que la musique manque aussi, terriblement !

DCJ : Je ne sais pas pour le public si cela leur manque tant que ça..

WB : Si, crois-moi !

DCJ : Oui, mais toi, tu es un public spécial, mais le public en général, qu’est-ce que tu en penses ? Vraiment, tu penses que cela leur manque beaucoup ?

WB : Oui !

DCJ : Tu le vois, toi ?

WB : Oui !

DCJ : Tant mieux alors..

WB : Je suis bénévole dans un théâtre à Utrecht, on est avec toute une équipe, une centaine de bénévoles, tout le monde n’aime pas la musique au même titre, certains sont moins fanatiques que d’autres, mais maintenant que ce n’est plus là, qu’on ne peut plus travailler, cela manque ! Ce sont des moments de beauté, de communion, je ne sais pas comment l’exprimer…

DCJ : J’ai pesté quand les restaurants ont fermé, je ne vais au jamais au restaurant, mais parce que j’avais la possibilité de ne pas y aller !

WB : J’ai une collection de disques assez phénoménale, je peux écouter de la musique à longueur de journée, mais tu sais où j’écoute le plus ?

DCJ : Dans la voiture ?

WB : Oui, exactement !

DCJ : Cela ne m’étonne pas, moi, c’est pareil. 

WB : Quand je suis chez moi, je mets la radio, mais j’écoute relativement peu de cd, alors que j’ai tout le temps du monde de les écouter tous ! Mais en voiture, on n’a rien d’autre à faire, alors là j’écoute ! 

WB : Et cela m’a ébranlé  quand j’ai lu que la série de Marco Riaskoff, Meesterpianisten, au Concertgebouw a dû arrêter, j’ai été catastrophé !

DCJ :  Je suis tombé par terre ! Je ne faisais pas partie de cette série, mais si Riaskoff prend le devant et décide de couper tout de suite, c’est qu’il a très bien senti ce qui va se passer dans les années qui arrivent, parce que c’est un homme remarquable.

WB : Plus, moi, ça fait plus de 30 ans que j’y suis allé !

DCJ : Donc tu étais pratiquement aux tout premiers concerts ? 

WB : Lors des deux premières saisons, j’ai écouté quelques concerts.

DCJ : Mais s’il décide de tout arrêter, cela donne un très mauvais signe à la musique classique aux Pays Bas !

WB : Je ne sais pas bien où on en est maintenant, mais j’ai peur.. au pire des pires, c’est le Concertgebouw qui reprend une série de piano, mais qu’est-ce qui va y avoir ? Ce seront des artistes comme Lang Lang qui doivent attirer un public nombreux…

WB : Par contre, le dernier concert que j’ai entendu avant le confinement, l’orchestre de Rotterdam avec Lahav Shani, un sacré musicien, avec Renaud Capuçon et un violoncelliste extraordinaire, Kian Soltani, très beau gars en plus… C’était dans la grande salle, il n’y avait personne, 200 dans une salle qui peut en contenir presque 2000, pourtant cela affichait ‘complet’. J’ai réussi à avoir un billet et j’étais au premier rang. Capuçon n’était pas mauvais, mais pour moi, il n’a pas le talent de ses contemporains, Vengerov ou Repin !

DCJ : Et Janine Janssen aussi !

WB : je n’aime pas beaucoup….

DCJ : Et il y a Hilary Hahn, elle est extraordinaire. 

WB : Et en octobre, j’ai entendu trois fois de suite Trifonov !

DCJ : Là, c’est autre chose, il fait partie à même pas 25 ans, de la classe de Radu Lupu, Murray Perahia.

WB : Il a joué le 1er concerto de Brahms et il peut faire des choses extrêmes, pourtant on ne dit pas : « Mais là, ça ne va pas ! » Ce n’est pas capricieux. Dans le dernier mouvement, il y a une cadence, où il a beaucoup ralenti, il s’est presque totalement arrêté, sans tomber dans des excès.

DCJ : Mais c’est une cadence, il peut faire ce qu’il veut ! C’est vrai qu’il est extraordinaire. Il y a un autre pianiste, qui ne fait pas beaucoup de bruit mais que j’aime bien, Leif Ove Andsnes. C’est un mozartien et ses Haydn sont super beaux aussi, ses Grieg. Il a un très beau son. Je l’aime aussi parce qu’il est discret, mais il est toujours présent. 

WB : Sans trop se lamenter de la situation actuelle qui est loin d’être rose : comment vois-tu l’année 2021 qui est sur le point de commencer ?

DCJ : Déjà avec mon nouveau disque, il y a un point positif. J’ai du mal à me mettre dedans, de par la situation. Il y aura une tournée aux Etats Unis,  grâce à William Riddle, qui est le fondateur de plusieurs séries musicales en Floride, et il tient cela à bout de bras. Il est inépuisable, j’ai beaucoup d’admiration pour lui, il est toujours en train de faire quelque chose. Il sait contourner les problèmes et cela me repose, je me suis dit : « Voilà, il y a la locomotive, c’est bien, je peux m’asseoir dans le wagon. C’est déjà pas mal. » On passe par Washington, New York, Baltimore, donc ce sont des projets vraiment intéressants. Au mois de juillet, je jouerai en Normandie. 

WB : Et pour les Pays Bas ?

DCJ : Je crains d’avoir à annuler le festival que j’avais prévu pour mars, ce n’est pas possible, c’est trop proche. Je n’aurais que quatre semaines pour faire de la publicité. 

WB : Et pour octobre tu prévois un autre festival?

DCJ: Pour Octobre 2021 du 14 au 17 il y aura un festival ou j’invite les pianistes Anna Fedorova, Yukiko Hasegawa, Tobias Borsboom, et Roberte Mamou. Il y aura également le quatuor limbourgeois « Eurasi Quartet » ainsi qu’un duo « Monumental Tango » avec la pianiste argentine Lucia Abonizio et le chanteur et ami Gilles san Juan, et bien sûr je ferais une prestation, d’ailleurs à 2 pianos avec Anna Fedorova dans la sonate de Mozart. Ce festival sera axé sur Piazzolla et Mozart car ce sont leurs anniversaires, et je voulais leur rendre hommage. Tout cela dans le cadre de ma fondation (je viens de la créer) « Klassika International ». Cette fondation a pour but de soutenir tous les arts et également les jeunes artistes. Il m’a semblé essentiel depuis cette « pandémie » de mettre le plus possible en lumière nos arts afin de ne pas les laisser mourir, car si on compte sur le gouvernement, on n’est pas aidé…….

WB : C’est une jolie collection !

DCJ : Oui, mais il y a beaucoup de femmes, là, il n’y a pas de parité (rires). Sinon, on va voir si on peut voyager en 2021 et dans quelles conditions. Je ne suis pas d’un tempérament pessimiste à la base, mais optimiste, jusqu’à une certaine limite. On croise les doigts ! 

WB : A l’occasion de ce festival as-tu des partenaires pour t’épauler dans cette démarche, et ou va avoir lieu cet événement? 

DCJ: Oui j’ai des partenaires! Toi par exemple via ton site, des journalistes de la presse écrite et audiovisuelle, comme musicologie.org représenté par Jean-Marc Warszawski ou encore Crescendo Magasine, de Nieuwe Muze bien entendu, et les journaux néerlandais bien sûr! Mais aussi Sint JansKerk, ou se déroulera l’événement, qui nous soutient énormément en terme de location de lieu. J’espère obtenir des subventions municipales et d’autres fondations dédiées à l’aide à la création artistique. Tout ce que j’espère c’est que Mr Rutte et son gouvernement ne nous bloqueront pas en fermant tous nos lieux de concerts, théâtres, musées etc…. Il va falloir commencer à savoir vivre avec ce virus, tout en étant prudent. Maintenant il est primordial de nous laisser travailler et vivre. De tout temps les arts ont sauvé l’humanité, il n’en sera pas autrement de nos jours. 

WB: As-tu d’autres projets pour les 5 ans à venir?

DCJ: oui bien sûr! Contre vents et marées! (Rires) je suis optimiste! Je souhaite rendre pérenne notre Festival au travers de notre fondation, je suis invité en 2022 et 2023 à faire plusieurs prestations en Floride et notamment avec la pianiste transgenre Sara Davis Buechner qui est absolument remarquable! Elle enseigne d’ailleurs a la Manhattan school of music, elle est une habituée de Carnegie hall, elle joue avec le Philharmonique de NYC, Los Angeles, Elle parcourt le monde Europe, Asie, USA etc… c’est une activiste remarquable également pour les droits LGBTQ+. Je te conseille d’ailleurs de la contacter pour l’interviewer, ça sera passionnant! 

Je compte également enregistrer un 2eme volet des compositrices, je ne sais sous quel label, mais c’est un projet. Il y a aussi un projet de réédition de mes 2 premiers CD (je ne peux en dire plus pour le moment) et la parution d’un livre sur les gens que j’ai pu rencontrer dans ma vie, des anecdotes de concerts, bref, ce livre aura pour but juste de partager une vie, une expérience. Il n’aura pas pour vocation de donner des leçons, ça ne parle que très peu de technique. Bref c’est juste ma vie (rires). Je remercie d’ailleurs mon ami Fréderic Boucher qui sera à l’écriture de cette biographie! 

 Mais dans les 5 ans qui arrivent, je souhaite par-dessus tout de rester heureux avec mon mari qui est ma pierre angulaire depuis 23 ans déjà….. Je souhaite à tout le monde rencontrer une personne aussi fantastique que lui, ou il ne se passe pas un jour ou l’on ne rit pas! La musique fait partie intégrante de ma vie mais n’est pas toute ma vie. Voilà quels sont mes projets à venir 